Des grives aux merles

Des grives aux merles

Nomenclature des armes de chasse à canon lisse - 3 : les 9 mm à percussion centrale (addenda).

11 Janvier 2025

 

A propos du calibre 9 mm, percussion centrale (PC ou CF: center fire), des lecteurs du blog "des grives aux merles" m'ont apporté quelques éléments d'information intéressants dans leurs commentaires.

 

Martelle :

 

"... Bjr vous avez oublié l'ancien petit calibre 9 mm à percussion centrale qui a survécu dans les années 50s "

"... j'ai vu une personne qui avait une carabine de marque Boucher, à verrou...les cartouches type 9 mm n'existent plus sur le marché...mais on peut tirer des cartouches de 9 mm Mori, des 9 mm PC de marque Babyotto..."

 

Bernache 13:

 

"... je sais que le calibre 9 mm percussion centrale était chargé avec des munitions à poudre noire.
Je sais aussi que beaucoup refaisaient à l'époque les cartouches et la bourre était en fait un filtre de cigarette brune gauloise ou gitane ."

 

Christophe :

 

"... On peut effectivement tirer dans ces anciennes carabines des 9 mm PC Mori. Toutefois, le diamètre de la Mori étant inférieur au diamètre des cartouches de cette ancienne 9 mm PC, les résultats sont décevants (gerbe dispersée) du fait du passage des gaz entre bourre et canon..."

 

Il n'en fallait pas plus pour me lancer à la recherche de renseignements sur ce 9 mm PC disparu !

 

1° La carabine 9 mm PC (ancienne):

 

 Première source: Naturabuy. Il y a pléthore de carabines calibre 9 mm: système Warnant, à verrou, à ouverture par clef, à bloc tombant, etc... Mais l'immense majorité sont en calibre 9 mm Flobert, c'est à dire à percussion annulaire.
2 exceptions, toutefois: 

 

- cette rarissime carabine signée "Leoncini Luigi, Sienna", datée 1880.

 

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Belle pièce de collection, prix demandé: 1500 €...

 

- plus probablement cette carabine Bergeron Regina en 9 mm PC, chambre: 45 mm et longueur du canon: 60 cm. Cette carabine date des années 50.

 

600h600f_00037_carabine-bergeron-regina-en--9mm pc.jpg

 

 

 

 

 Deuxième piste de recherche: le RGA (Référentiel Général des Armes) du SIA.

En 9 mm CF, le RGA n'a enregistré, actuellement, que 7 armes mono-coup de ce type:

 

- Carabine Gaucher Fauvette ( longueur canon: 500 et 550 mm)
- Carabine Gaucher Star ( longueur canon 650 mm )
- Carabine Manuarm ( longueur canon 650 mm )
- Carabine Artisan stéphanois ( longueur canon: 650 mm ), référencée 2 fois.
- Carabine Poli Nicoletta ( longueur canon: 710 mm )

 

Gaucher Star 9 mm PC.jpg

           ( Gaucher Star, 9 mm PC )

 

Il semblerait que cette carabine n'aie pas été très répandue, en tout cas, personnellement je n'en ai jamais vu.

 

Remarque: Martelle fait état d'une carabine de marque Boucher.
Après recherches, je n'ai trouvé que 2 armuriers de ce nom:

- la Manufacture d'Armes fines Boucher à Saint Etienne (1920-1990), spécialisée dans les armes de prestige.

- il existe à Amiens l'armurerie "la Sauvagine", Etablissements Boucher Vincent EURL.

 

2° Les cartouches 9 mm PC (ancienne): 

 

On trouve sur Naturabuy des cartouches bleues 9 mm PC, étui carton bleu, culot laiton, chargées à poudre noire, marque Gévelot.

Elles sont "collector", prix: à partir de 2 € pièce.

 

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Autre source beaucoup plus intéressante, l'excellent site espagnol Municion.org ( https://www.municion.org/ ); c'est une véritable Bible !

Alors voyons ce qu'il dit à propos du calibre 9 mm:

 

a / le 9 mm Flobert (pour mémoire):

 

Percussion annulaire, très populaire et toujours en service.
A 10,25 mm du culot, l'étui est rétréci pour s'adapter à l'intérieur du canon. Ainsi, la longueur totale des cartouches dépend uniquement de la charge qu'on souhaite mettre.
Les double-charges sont plus longues que les simple-charges.
Produites chargées, autrefois, avec de la poudre noire, couleur verte ou poudre sans fumée, couleur orange.
Disponibles actuellement avec des étuis laiton, produites par Fiocchi, RWS, Vouzelaud, Tunet. Prix: en moyenne, 25 € les 50 cartouches.

 

 

 9 mm flobert modifié.png

 

 

b / comparatif 9 mm PC:

 

 

Ce sont ces cartouches à percussion centrale qui nous intéressent ici.

 

comparatif 9 mm PC.png

 

 

Pour une meilleure lisibilité, je reprends, ci-dessous les dimensions communiquées par Municion.org:

 

 

Dimensions 9 mm PC.png

 

 

- La "vieille 9 mm PC est parfaitement cylindrique, c'est une vraie 9 mm, les 2 autres sont des 8 mm.


- Quoique plus longue de 4 mm que la 9 mm PC, la 8 mm CF (Babyotto) devrait rentrer car très légèrement conique, par contre, elle "flotterait" : diamètre au culot inférieur de 0,18 mm; mais surtout, au sommet de l'étui, on a un écart de -0,87 mm. Ce qui est beaucoup et générerait une fuite des gaz susceptible de perturber la gerbe de plombs.

- Quant à la 9 mm Mori, je doute fort, pour ma part, qu'elle puisse être tirée dans la 9 mm PC: gros écart au niveau du diamètre du bourrelet: -0,94 mm; -1,16 mm au culot et -1,29 mm au sommet de l'étui... Pour ma part, je ne m'aventurerais pas à employer cette cartouche dans une "vieille" 9 mm PC !

 

 

 

Voilà, fin de mes recherches.

Finalement, je n'ai trouvé que peu d'informations sur cette "mystérieuse" 9 mm PC et je suis preneur de toute information à ce sujet.
En tout cas je remercie mes lecteurs de leurs commentaires qui m'ont conduit à faire ces recherches.
Au plaisir de vous lire.

RG

 

 

 

 Ah ! Une curiosité sur Naturabuy, déjà vendue:

 

400f_00037_AUSSI-RARE-QU-EXCEPTIONNEL-CARABINE-9mm-FLOBERT-ET-9mm-MORI--2-CULASSES--CENTRALE-ET-ANNULAIRE.jpg

...carabine 9mm à deux culasses une en percussion annulaire soit du 9mm Flobert et l'autre culasse en Percussion centrale soit du 9mm Mori elle chambre et tire les deux sortes de cartouches...

 

 

 ξ

 

 

 

 

 


11/01/2025
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SIA ou les gaietés du "ratelier virtuel".

Le Principe,SIA chasseurs, ce qu'il faut savoir:

 

  • Le SIA remplace désormais l’application AGRIPPA (fichier informatisé des propriétaires et possesseurs d’armes)
  • le SIA ne concerne que les détenteurs d’armes déclarables ou soumises à autorisation (catégories A, B et C)
  • La création de son compte personnel est obligatoire pour conserver son droit à détenir ses armes
  • Date limite pour ouvrir son compte = 30 juin 2023
  • Simplification pour l’achat d’armes auprès d’un armurier
  • Possibilité de générer sa carte européenne d’armes à feu et d’effectuer des démarches administratives via l'espace personnel
  • Les armes à un coup par canon, à canons lisses acquises avant 2011 et qui ne nécessitaient pas de déclaration (ancienne catégorie D1) n’ont pas à être enregistrées obligatoirement dans le SIA.

 

 A venir:

 

•  Ouverture du SIA aux tireurs de ball-trap et aux biathlètes ;
•  Ouverture du SIA aux non licenciés (armes héritées ou trouvées) ;
•  Ouverture du SIA aux tireurs sportifs ;
•  Ouverture du SIA aux collectionneurs.

 

  

... et le ressenti: 

 

En obligeant les chasseurs à s’inscrire à un « râtelier virtuel », sur Internet, l’administration donne un tour de vis supplémentaire. Il pourrait s’accentuer encore quand elle décidera que, sans cette inscription, on ne pourra pas valider son permis de chasser.

La pression sur les armes des honnêtes gens s’accentue. Le pistolet du grand-père, le fusil de chasse du tonton, le revolver de l’arrière-grand-père, la carabine de papa… Ce sont des milliers d’armes qui ont été rendues lors de l’opération qui s’est tenue sur le territoire métropolitain ainsi que dans certains territoires d’Outre-mer, du 25 novembre au 2 décembre dernier. Dans un communiqué, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est félicité du succès de l’opération. « Il ressort du bilan, encore provisoire, que 150 000 armes, dont 140 000 armes à feu, ont été abandonnées à l’État », détaille le ministère. « Parallèlement, 50 000 armes, jusqu’ici non déclarées, ont été enregistrées dans le système d’information sur les armes (SIA), permettant la régularisation de leurs propriétaires. Près de 200 000 armes sont ainsi sorties de la clandestinité. En complément, près de 4 millions de munitions et de projectiles ont également été collectés ».

Avant de revenir sur « le râtelier virtuel », insistons sur ce point important : ce ne sont pas les voyous qui ont rendu les armes ! Les braqueurs, les truands et les terroristes qui, d’ailleurs, préfèrent la kalachnikov au fusil ou à la carabine de chasse, les conservent à l’abri. Ce sont de braves gens, des enfants ou des petits-enfants de chasseurs qui, eux, ne chassent plus, des personnes qui découvrent dans une cave ou au grenier une arme de poing datant de la seconde guerre mondiale, des héritiers dans l’embarras. Le ministre aurait dû le rappeler au lieu de se glorifier d’un bilan qui ne réduira en rien la criminalité. Quand il dit que 50 000 armes sont « sorties de la clandestinité » après inscription au SIA, on a le sentiment qu’elles appartenaient à des individus dangereux, que l’on a réussi un coup de filet magnifique ! Alors qu’il s’agit de paisibles Français ! La presse aussi s’est emballée. Dès que l’on parle d’armes, elle sonne le tocsin ! Or, ce n’est pas l’arme en elle-même qui est dangereuse. Mais la personne qui est derrière.

À quoi cela peut-il bien servir de savoir que M. Dupont a acheté un fusil de chasse calibre 12 ? Ou que Madame Durand a acquis une carabine 7×64 ? À rien, puisque ces acheteurs n’ont aucune intention criminelle !

Les bandits, eux, ont leurs propres circuits. C’est un marché énorme qui prospère chaque année davantage. Et assez facile d’accès. Au marché noir une « Kalach » se négocierait, selon la police, autour de 300 euros. Toute cette fanfare doit bien amuser la grande truanderie !

 

Pas d’humain compétent au téléphone

Depuis maintenant trente ans, on nous parle « d’alléger les formalités administratives ». Or, c’est le contraire qui se produit. Toujours plus ! Contrairement à ce que souhaitait un ancien président de la République, on n’arrête pas « d’em… les Français » en général, et les chasseurs en particulier.

Dernier tour de vis en date : l’inscription des armes au SIA (Service d’Information sur les Armes) est maintenant obligatoire. On y accède sur Internet en tapant « SIA » sur un moteur de recherche.

Si la procédure informatique se déroule bien – ce qui n’est pas toujours le cas – vous obtiendrez un numéro d’enregistrement SIA. Ne l’oubliez surtout pas – ce qui m’est arrivé – car si vous l’égarez, la récupération du compte est quasi impossible. Vous ricocherez des jours durant, de service en service, sans parvenir à conclure. Tout se passe évidemment par voie informatique, mails, « bugs » et compagnie. Impossible d’avoir un humain compétent au téléphone.

 

Arme fatale

L’administration, toujours imaginative, a dans ses cartons l’arme fatale : interdiction de valider le permis si vous n’avez pas votre compte SIA. Toutefois, selon Dany Magloire, le patron de l’armurerie Jeannot, à Levallois, « ce sera très difficile à mettre en place pour la bonne raison que seulement dix pour cent des chasseurs ont fait la démarche ». Les chasseurs ont compris qu’en traînant les pieds, ils paralysent la pieuvre.

Et sur le terrain ? Les gardes pourront-ils verbaliser au motif que vous n’êtes pas inscrit au SIA ? « En fait, dit toujours Dany Magloire, il est fort probable que les gardes et les autres agents assermentés seront directement connectés au service. Ils pourront ainsi vérifier que votre arme est en règle ».

Et le fameux « passeport européen » sur lequel les armes sont dûment déclarées à l’administration ? Eh bien, il est toujours obligatoire pour voyager mais insuffisant pour vous couvrir. C’est l’effet « millefeuilles » cher aux bureaucrates. Vos armes inscrites sur le passeport doivent aussi passer au « râtelier virtuel », alors même qu’elles sont déclarées !

Résumons : pour l’instant, il est impossible d’acheter une arme ou de la vendre sans avoir « de râtelier virtuel ». Cela décourage évidemment tous ceux qui ont envie de changer de fusil, de carabine ou de calibre, ou tout simplement envie de se faire plaisir.

 

 

Source: article de Eric JOLY, publié dans le "Betteravier Français", le 15 décembre 2022.

 

 


03/01/2023
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Cuisine et poèsie.

Revue La grive format iPod photo.jpg

 

 

La grive à l’ardennaise

 

///\\\

 

Dépouillez de son duvet

l'oiselet.

Mettez à nu la roussette.

Et, du petit croupion

Du tendron

Faites aussi la toilette.

Troussez-le, n'entamez pas

Ses appas.

Dans le beurre chaud qui fume,

Sur le lardon pétillant,

A feu lent,

L'oiseau doré se parfume.

Il faut, laissant mijoter,

Ajouter

Sauge, sel, poivre à votre aise.

Et voilà, dans ce canton,

Comment on

Fait la grive à l'ardennaise

 

///\\\

 

Dr Séjournet. Almanach Matot pour 1904


06/11/2020
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GIBIERS D'APPOINT, J. Nard.

Auteur de divers ouvrages sur la chasse, dont "Chasse pratique" déjà cité, J. Nard publie en 1968, aux éditions de La Maison Rustique, un petit livre de 88 pages intitulé "Gibiers d'appoint", consacré aux grives, merles, alouettes et ortolans, à leur description, à leurs moeurs et à leur chasse. 

Ce petit livre est particulièrement interessant à lire, en dépit des opinions parfois très tranchées de l'auteur.

RG

 

 

 Gibiers d'appoint (Copier)_crop.jpg

 

 

 

"Pour les grives, les modes de chasse utilisés ..... peuvent se résumer à quatre: la chasse à quêter, la chasse à la poursuite, la chasse au poste (qui n'est qu'une chasse d'affût) et la chasse en battue...."

S'agissant de la chasse au poste, l'auteur la décrit ainsi: "Chasse d'affût par excellence, la chasse au poste (au posé ou en vol) nécessite essentiellement un lieu d'installation favorable, un abri pour le tireur, éventuellement des appeaux...

... Les grives venant assez facilement aux appeaux, il ne faut pas s'étonner que ces derniers soient mis en oeuvre pour augmenter le rendement de la chasse au poste. Il y en a de tous les modèles, pour toutes les variétés de grives....

....Quant à la façon de s'en servir, je n'en parlerai pas pour deux raisons: la première c'est que je ne les ai jamais utilisés, la deuxième c'est que je n'approuve pas le procédé consistant à attirer un gibier à portée de tir en imitant le cri de son semblable...

...Les mêmes raisons me font désapprouver l'emploi des appelants capturés vivants..."  C'est clair!

 

Une petite curiosité, traitant des merles (noir, à plastron, de roche, bleu), l'auteur perpétue une erreur très ancienne, citant "le merle d'au ou merle plongeur, vivant le long des ruisseaux de montagne.... taille du merle... plus trapu... couleur brune... gorge et poitrine blanches... queue roussâtre..." Il s'agit en fait du cincle plongeur qui n'appartient pas à la famille des turdidés.

Quoiqu'il en soit, ce petit livre est très agréable et instructif à parcourir.

Il est possible de se le procurer auprès d'Amazon, Priceminister, EBay ou Abebooks

 

 

 

 


12/03/2016
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La cuisine paysanne d'Ardèche.

Sous-titre du livre:  " La vie des Fermes et des Champs racontée par une Enfant du Pays "

J'avoue que j'ai eu du mal à classer ce livre car c'est à la fois un livre de cuisine mais aussi un livre qui traite de l'agriculture paysanne, des cueillettes sauvages, des traditions,  etc...

L'auteur (aujourd'hui on écrit auteure...), Sylvette Béraud-Williams est ethnologue.

Je lui laisse le soin de se présenter elle-même:

 

" Mes parents étaient paysans, sur les pentes maigres des côteaux de l'Eyrieux où poussaient la vigne et le châtaignier. Je garde de cette enfance un lien privilégié à la terre, et un immense respect envers ceux qui la cultivent. J'ai eu l'occasion d'étudier quelques facettes de leurs connaissances et de leurs savoir-faire et de rendre hommage à leur travail indispensable et si peu reconnu. Tout projet relatif à l'agriculture traditionnelle et à son évolution m'intéresse à double titre : parce que je me sens intimement concernée, mais aussi parce que la souveraineté alimentaire est l'un des enjeux-clés de notre civilisation. "

 

Lacuisine paysanne d'Ardèche (Copier).jpg

 

... et bien sur, dans ce livre passionnant, il est question de grives (modes de chasse, capture, cuisine) et d'autres chasses traditionnelles aujourd'hui interdites comme la chasse des petits oiseaux. Et de bien d'autres choses encore...

RG 

 

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La grive de vigne se fait finalement

Comme le perdreau…

 

LA GRIVE

 

Michel Rouvière : « La grive de vigne se fait finalement comme le perdreau. Les tourdres, rôties, toujours rôties. On les tuait dans les vignes après la vendange. »

C’est le gibier à plume le plus estimé, tout au moins des chasseurs qui ont bien voulu nous faire part de leurs souvenirs. A l’automne, les grives fuient la montagne pour se réfugier en climat plus clément. Elles assiègent alors les vignes et font une orgie de grains de raisin qui leur donne une chair particulièrement savoureuse. Avant la guerre, il y avait à Balbiac, le dernier dimanche d’octobre (après les vendanges), ce qu’on appelait la « vogue (1) des tourdres », qui en dit long sur l’importance de ces passages de grives localement.

Trois espèces m’ont été décrites : le tourdre serait la meilleure. Elle arrive la toute première dans les vignes en livrée gris-beige à plastron blanc pointillé de taches sombres. Il y a la draine, « la musicienne (2) », nous dit Louis Terras de Saint Fortunat, plus grosse, aux ailes et au bout de la queue bordés de roux. Et puis celle qui venait en vols serrés, serrés, serrés, on l’appelle la « fiafia » (c’est son cri). Elle venait après les genièvres en hiver, mais les genièvres ça s’est perdu, c’est le chêne vert qui a pris le dessus », ajoute-t-il. La litorne ou fiafia de la vallée de l’Eyrieux, tias-tias dans les environs de Vernoux pour son cri caractéristique que chacun interprète à sa façon, devient tcha-tcha du coté de Vinezac. Elle s’abattait en volées nombreuses sur les houx, lierres, aliziers. Toute baie faisait l’affaire. Celle du genévrier leur donnait un gout si puissant que leur chair était à peine mangeable lorsqu’elles s’étaient laissées aller à en faire une cure. Les hommes les attendaient à l’affût dans quelque abri de branchage improvisé, ou cachés derrière un muret, dans l’air glacial d’un très petit matin d’hiver vibrant de givre sur les Gras.

 

Notes du transcripteur :

(1)     « vogue » : fête.

(2)     N’en déplaise à Louis Terras, l’appellation « musicienne » s’applique au tourdre (turdus philomelos) et non à la draine (turdus viscivorus).

 

Grives rôties

Et, dans l’or sertie,

La fauve rôtie,

Amant non trompé,

Un instant te rive

Au ventre de grive

Sur son canapé

 

Les grives embrochées devant la braise. En cuisant, leur jus s’écoule sur des tranches de pain grillées, disposées au-dessous, sur un plat allongé ou sur la lèchefrite.

Si l’on ne dispose pas de cheminée : les grives sont rôties en cocotte avec un peu de beurre, bardées d’une fine tranche de lard. On ajoute une gousse d’ail en chemise et on cuit sans brusquer.

 

Grives sur canapés

Juliette Rouvière : « On les faisait rôties. On commençait à faire des salmis : rôties puis à la moulinette. Elles étaient pilées, les carcasses, tout, pas l’intérieur, avec du lard grillé, et après on étendait ça sur une tartine de pain rôti. »

……………………………………………………………………………………………………………

Plumez, videz, bardez les grives et faites les rôtir dans une cocotte avec une gousse d’ail non épluchée, un peu de beurre et d’huile, pendant un quart d’heure. Faites griller de petites tartines dans du beurre. Pendant ce temps hachez les « intérieurs » : les foies, les cœurs, etc…, sauf le gésier.

On ajoute à cela de la moutarde, des lardons, la gousse d’ail qui a servi a la cuisson des grives, du sel, du poivre, une cuillerée d’huile, un filet de vinaigre et un peu de jus. On pétrit à la fourchette jusqu’à former une pâte que l’on tartine sur les tartines de pain grillées. Puis on y pose les grives. Arroser avec leur jus de cuisson et passer au four moyen pendant dix minutes. Servir très chaud.

 

La croustade aux petits oiseaux (Jo Pellegrino à Chandolas)

« Maintenant, je les fais avec des cailles que j’achète, mais avant je le faisais avec des grives, des merles. J’avais un gamin qui chassait, alors on faisait ça. On faisait rôtir avec du lard. Je désossais. Je passais tout ça à la moulinette. J’ajoutais un verre à liqueur de moutarde quand on a sept ou huit grives, autant d’ail. Je frottais le pain avec l’ail, vous mettez la croustade dessus et vous mettez ça au feu. »

« J’en avais fait une fois avec deux pigeons ; j’ai fait manger quatre flûtes de pain, on était vingt. J’enlevais que les gros os des pattes et des ailes, tout le reste passait à la moulinette.»

 

 

croustade de grives (Copier).jpg

 

  

Salmis de grives

«  Prenez vos grives, plumez-les, enlevez le dessous du bec avec l’œsophage, parez-les de lard et faîtes-les rôtir aux trois-quarts. Retirez-les du feu. Lorsqu’elles seront refroidies, coupez les têtes, le bout des ailes, coupez vos oiseaux par le milieu et videz les intérieurs. Pilez les têtes, bouts d’ailes et intérieurs très soigneusement. Pendant ce temps vous avez fait revenir un peu d’oignon, une petite carotte avec le jus des grives, vous ajoutez la pâte des grives préparées, persil, laurier, thym, poivre, une gousse d’ail, un bon verre de vin rouge vieux. Laissez réduire jusqu’à ce que le vin soit évaporé. Liez avec une cuillère de farine et un peu de bouillon. Passez votre sauce au chinois. Faites griller des tranches de pain dans du beurre, mettez dessus les membres des grives, versez la sauce et faites réchauffer le tout au four. Servir très chaud. Tel on le prépare au Bourg-saint-Andéol. »

 

moulinette-vintage-moulinex (Copier)_crop.jpg

 

Caillette à la grive

Pour 6 personnes : 500 g de foie de porc, 250 g de chair de porc gras et maigre, 50 g de lardons. Couper le tout en lamelles minces, faire macérer avec deux grives et la crépine, dans du vin blanc avec sel, poivre, une grosse pincée d’épices (poivre, coriandre, muscade, fenouil, genièvre, le tout pilé finement), pendant 48 heures. Désosser les grives, hacher toutes les viandes finement, ajouter une poignée de chapelure. Mouler les caillettes et les couvrir de crépine. Faire cuire à four moyen. Servir froid.

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Une fois dans l’hiver mon mari

avait tué vingt-deux merles…

 

JEUNES MERLES, GEAIS, CORBEAUX, PIES ET AUTRES OISEAUX

 « Une fois dans l’hiver mon mari avait tué vingt-deux merles, il m’a fallu faire cuire tout ça. C’est bon le merle. »

Tout ce que la nature offrait à portée de la main pouvait être considéré comme nourriture possible. Et l’on ne se privait pas de voler au nid - les adultes étant trop coriaces - geais et quelquefois pies (mais quelle piètre chère que ces dernières !) et surtout les merles. On les bardait de lard (Eliette Soullier enlevait la peau du geai avant de le barder) et les faisait rôtir. Le merle se prépare comme les grives. Le corbeau aussi passait à la casserole : « on le faisait bouillir : ça fait un bouillon blanc, et il paraît que le bouillon est bon… » Mais là ne s’arrêtait pas le tableau de chasse. Et c’est sur le ton de la confidence, un brin gênée que l’on avoue s’être parfois régalé en hiver de ces proies faciles que constituaient d’encore plus petits passereaux, rabattus par la neige et le froid auprès des maisons ou des terres cultivées en quête de nourriture : « l’hiver, quand il faisait froid, on prenait des merles, des grives, des petits rouges-gorges, des mésanges, des bergeronnettes (des fois ça faisait mal au cœur !), des pinsons… Alors, les pinsons, quand il faisait très froid, ils se ramassaient en bandes. Ils les appâtaient dans la neige et ils y allaient à la carabine, des bouraïres (1), ils mettaient de la poudre avec une amorce et ils les tuaient avec ça. Ils portaient le panier à salade et ils revenaient avec un plein panier d’oiseaux et nous on plumait, on nettoyait tout ça. Et le soir on mangeait nos petits oiseaux (c’était du luxe) dans la grande poêle et on faisait rôtir ça, roulé dans une barde de lard, dans la cheminée, avec un peu de saindoux. Les merles, on les cuisait dans la cocotte, la coquerle. »

Nourriture providentielle reçue comme une manne céleste en complément de ce que les propriétés trop petites ne pouvaient apporter.

 

Notes du transcripteur :

(1)     Bouraïres : vraisemblablement d’antiques fusils à piston, chargés avec du très petit plomb.

 

 

corneille.jpg

 

 

 Sources:

- Site web de l'auteur: http://www.sylvetteberaudwilliams.com/

 

 


22/03/2025
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