Des grives aux merles

Des grives aux merles

La bibliothèque de l'amateur de grives.


BIBLIOTHÈQUE ET ANTHOLOGIE DU CHASSEUR DE GRIVES ET DE MERLES (Préliminaires)


Voilà un bon moment que je caressais le projet de constituer une bibliothèque ainsi qu'une petite anthologie consacrée aux grives, aux merles, et    à leur divers modes de chasse. 

Les courts extraits que je présente ici observent les textes de loi quant au respect des droits d'auteur, tant moraux que patrimoniaux.
Ce ne sont que des extraits et ils sont une incitation à la lecture des livres dont ils sont tirés.
(Sources : ma bibliothèque-chasse personnelle, mes recherches sur le net.) 

RG

 

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06/09/2015
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Chasses à la grive autrefois dans le bas Bugey.

Bon, c'est un fait, ce texte est particulièrement long comme me l'a fait remarquer mon aimable co-lectrice !

On dira que le style est "daté" (XIXe siècle) ... Et encore, j'ai épargné le lecteur en supprimant les très très longs hors sujets qui mis bout à bout doublent la longueur du texte.

Tel quel, il présente un intérêt documentaire certain sur les pratiques de chasse traditionnelles dans l'Ain dans les années 1800. 

RG

 

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Si  la  poursuite  du  gibier  a  ses  charmes,  l’attente immobile  ne  manque  pas  non  plus  de  douceurs.  La  pipée a  ses  fanatiques,  l'affût  ses  martyrs,  le  miroir  ses  amateurs, surtout  quand  de  jeunes  dames  viennent  en  souriant s'asseoir  sur  un  coussin  et  consentent  à  tirer  la  ficelle;  la traînasse,  la  tomberelle  et  la  longue  série  des  filets  auraient leurs  sectateurs  si  l'autorité  ne  veillait  pas,  et  si  le  garde n'était  pas  chargé  d'apprendre  aux  profanes  que  la  chasse est  simplement  une  distraction  et  un  plaisir  et  non  une spéculation  et  un  ravage.

Tous  les  filets,  cependant,  ne  sont  pas  défendus.  On  les emploie  à  prendre  les  pigeons  dans  les  Pyrénées,  on  les autorise  dans  certains  pays,  pour  la  grive  et  la  bécasse.

Cette  dernière  chasse  est  populaire  dans  le  département de  l’Ain  ;  il  n’est  pas  de  vigneron  qui  n'ait  sa  pantière; beaucoup  de  fils  de  famille  qui  chassent  au  fusil  dans  la journée,  s'empressent,  le  soir  avant  la  tombée  de  la  nuit, ou  une  heure  ou  deux  avant  l'aurore,  de  charger  leur  sac sur  le  dos  et  de  gagner  la  montagne  où  leur  poste  est  préparé.

Pendant  les    longues  soirées  d'hiver,  quand   la  neige tombait,  quand  le  vent  sifflait  et  que  la  famille  assemblée travaillait  autour  du  feu,  on  a  raccommodé  et  mis en  état toutes les  mailles de la  pantière. Voilà  l’automne, les  raisins sont  mûrs,  les  grives  arrivent: c'est  le  moment  de s'établir.

 

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On  choisit  à  bord  de  bois,  dans  un  sentier, une  clairière, non  loin  des  vignes,  un  endroit  propice, ni  trop  vide ni trop  ombragé. On  plante,  à  cent  pieds  de  distance,  deux hautes  et  fortes  bigues ou  perches  dont  le  haut est  fourchu ; parfois,  on  se  sert  d'une  forte  branche  dépouillée faisant  crochet  à un  arbre  élevé; l'essentiel  est  que  le support  soit  solide et  que  la  corde glisse rapidement dans la  fourchette qui  sert  à  hisser  le  filet.

Une  perche  longue,  légère  et  fourchue  sert  à  élever  le cordeau  et  à  le  passer  à  la  fourchette  Immobile.

On  tire  sur  la  corde,  et  le  filet  monte  lentement  jusqu'à la  hauteur  de  la  bigue  ou  de  l'arbre  qui  sert  de  premier support.

On  attache,  par  un  nœud  simple  et  facile  à  défaire,  la corde  à  hauteur  d'appui  et  l'on  court  à  la  seconde  bigue faire  la  même  opération.

Le  filet  est  tendu  ;  une  haute  muraille  verte  dont  le  tissu se  confond  avec  le  feuillage,  sépare  la  partie  du  bois  où l’oiseau  a  dormi  de  la  vigne  où  il  va  prendre  son  repas  matinal.

On  jette  sur  le  sol  un  dernier  coup  d'œil;  on  coupe  les branches  qui  pourraient  gêner  ou  déchirer  le  filet,  on  aplanit les  herbes  de  la  clairière,  on  nettoie,  on  est  inquiet,  on revient.  La  forêt  tout  entière  murmure,  les  chasseurs  occupent tous  les  passages  ;  il  y  a  là,  de  distance  en  distance, toute  la  jeunesse  du  village;  l’un  emprunte  une serpette,  l’autre  a  égaré  sa  perche,  un  autre a cassé  sa cheville  ;  puis  chacun se  range  debout  et  attentif  au  pied de  sa  bigue;  un  immense  silence  se  fait,  on  croirait  être dans  une  forêt  vierge,  dans  un  monde  vide  et  désert;  on attend.

 

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Chaque  chasseur  tient  sa  corde  dans  sa  main,  l’oeil  fixé vers  la  sortie  du  bois,  à  la  hauteur  de  la  pantière.  Le  cœur bat  d'espérance,  les  rêves  les  plus  roses  éclosent  et  s'épanouissent :  on  pense  que  les  grives  vont  être  abondantes  et pressées,  que,  pour  descendre,  une  bécasse  pourrait  bien choisir  ce  passage;  qu'une  compagnie  de  perdrix  est  dans le  canton  et  que  rien  ne  l’empêcherait  de  venir  se  jeter toute  entière  dans  le  filet.  Quelle  nouvelle  dans  le  pays!

Quelle  aubaine !  quel  triomphe  pour  le  chasseur !

Nous  avons  fait cette  chasse,  sur  les  collines  qui  bordent la  rivière  d’Ain  et  nous  avons  rarement  éprouvé  de moment  plus  délicieux  que  celui  qui  précédait  le  réveil  du gibier.

Les  dernières  heures  de  la  nuit  s'écoulaient  ainsi.  Puis les  étoiles  pâlissaient  ;  la  nuit  devenait  d'un  bleu  doux  et tendre,  l'air  fraîchissait  ;  sous  ce  souffle  imperceptible  du matin,  les  habits  devenaient  plus  légers.  Alors, l'attention redoublait;  la chasse  allait  commencer.

Le  premier  être  qui  s'agitait  dans  le  silence  des  bois était  le  faux-bourdon (1).  Son  grondement  ailé,  le  bruissement rapide  et  continu  de  ses  ailes,  ce  bourdonnement  sonore qui  lui  a  fait  donner  son  nom  était  le  premier  signal du  réveil  de  la  forêt  Le  faux-bourdon,  désireux  de  déjeuner, quittait  son  arbre  et  volait  sans  idée  bien  fixe  et  bien arrêtée;  arrivé  devant  les  mailles  du  filet,  il  trouvait  un obstacle  inconnu,  insolite  qui  l'inquiétait  et  piquait  sa curiosité  ;  il  passait  et  repassait  à  travers  les  fils  invisibles, en  haut  et  en  bas, à  droite, à  gauche,  étudiait  ce mystère  qui  dépassait  les  bornes  de  son  intelligence, puis donnant  sa langue  au  chat,  s'éloignait  sans  avoir  compris ce que pouvaient  être ces fils tendus  sur  son  passage  et dont ses  amis ne lui avaient  jamais parlé.

Le  second par ordre, le  second  aussi  par  la  taille et la curiosité, était  le  roitelet, qui  passait  fier  et  gai,  l’estomac vide  et  déjà  joyeux  et  de  bonne  humeur !

Aussi pour lui, ces  mailles étaient un  problème;  les fils verts échappaient à sa  vue;  il  les  heurtait  de  l'aile, mais  ils  ne l’empêchaient pas de traverser. Inquiet, vivement  intrigué, il  allait, venait, revenait, se  faisait  un jeu de passer et de repasser à travers  les  mailles;  puis l’appétit  parlant plus  haut, le roitelet  partait à son tour laissant ce  mystère incompris.

Après  le  roitelet,  venait  le  rouge -gorge.  Courageux, hardi,  confiant,  le  rouge-gorge  se  heurtait,  revenait  se frottait  aux  mailles  en  faisant  entendre  un  petit  cri  de  méfiance  et  d'étonnement.  Rien  n'est  gracieux  comme  l'éclat métallique  de  son  chant;  ce  jeu  répété  plusieurs  fois,  le rouge-gorge  fuyait,  aussi  curieux,  aussi  ignorant  du  mystère que  ses  devanciers.

 

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Voilà  que  dans  la  forêt  éclate  la  trompette  du  merle.  Il se  réveille,  moqueur  et  sauvage;  il  fait  claquer  son  bec et  s'avance,  non  en  volant  comme  un  étourdi,  mais  en  sautant  de  branche  en  branche,  écoutant,  éclairant  sa  route, sondant  le  terrain  et  se  méfiant  de  tous  les  dangers.

Voilà  le  merle  ;  le  silence  est  plus  profond  encore,  le  gibier est  rusé;  toutes  les  respirations  s'arrêtent,  tous  les mouvements  sont  suspendus.

Il  s'approche  en  zigzag,  et  son  cri  moqueur  indique  le scepticisme  et  l'égoïsme  de  son  esprit;  son  œil  plonge  au loin,  il  écoute,  il  raille,  il  se  moque  ;  il  va  déjeuner,  là-bas, dans  la  vigne,  avec  des  vers  et  du  raisin  ;  il  se  réjouit, mais  ne  se  presse  pas;  les  bois  sont  si  peu  sûrs;  mais bien  fin  qui  le  surprendra.  Il  s'approche,  fait  un  saut, tressaille  et  s'arrête.  Tout  son  être  est  immobile;  sa  prodigieuse sensibilité  l'a  prévenu,  le  fluide  magnétique  du filet  vert  lui  a  envoyé  ses  effluves, quel  est  ce  danger qu'il  soupçonne,  qui  l'effraye  et  qu'il  ne  connait  pas ?

Il  saute  en  arrière,  rien;  il  saute  en  avant  et  frémit.  Il monte   au   sommet  des  taillis,  le  danger  existe  encore. Il  saute  à  droite,  il  saute  à  gauche,  partout  l’effluve  l'impressionne ;  il  regarde  et  ne  voit  rien  ;  il  écoute  et  n'entend rien.  Il  crie,  s'impatiente,  claque  du  bec,  s'irrite,  creuse  sa mémoire,  sonde  son  cerveau,  se  demande  si  ce  danger  lui a  déjà  apparu?  Il  ne  se  souvient  de  rien. Ses  parents,  dans  son  enfance,  ne  lui  ont  pas  révélé  ce danger.

Est-ce  une  bête  féroce  qui  est  devant  lui?  Il  la  provoque comme  il  fait  du  loup,  du  renard,  de  la  fouine;  rien  ne  répond. Est-ce  la  chouette?  Il  la  verrait,  et  d'ailleurs,  il  la connaît,  il  l'a  combattue  et  poursuivie  assez  souvent.

Il  se  rassure,  s'encourage;  il  crie  plus  fort  pour  n'avoir pas  peur;  son  estomac  le  tiraille;  il  faut  en  finir,  le  déjeuner est là-bas  et les autres auront  bientôt  tout  pris ;  c'en est  fait, il  vole  en  avant...

Au  premier  coup  d'aile,  il  est  dans  les  mailles  du  filet; il  est  captif,  le  filet  tombe  et  un  poids  immense  pèse  sur  lui.

Alors,  il  pousse  des  cris  déchirants,  le  désespoir  inonde son  coeur.  Voilà  donc  ce  danger  qu'il  pressentait;  il  aurait dû  le  deviner,  fuir  en  arrière,  faire  un  grand  contour,  au besoin  attendre  sous  bois.  Ah!  le  malheureux  qui  s'est laissé  surprendre,  ah!  l'infortuné  qui  va  mourir,  mourir, lui,  si  fin  et  si  rusé,  pris  au  piège,  lui  si  méfiant.  Au  secours !  vous  autres,  au  secours  !

Mais  c'est  bien  pis,  voilà  le  chasseur  qui  se  précipite en  se  baissant  ;  les  cris  et  les  sauts  redoublent  à  son  approche;  il  essayerait  volontiers  les  coups  de  bec,  mais  il est  trop  gêné.  Une  main  leste  le  saisit,  et  du  pouce  et  de l'index,  lui  écrase  la  tête;  il  a  vécu.

Le  chasseur  retourne  en  courant  à  sa  bigue  ;  le  filet  est rapidement  relevé  ;  un  grand  silence  se  fait  à  nouveau.

Voilà  qu'un  coup de  sifilet  retentit  dans  le  bois;  c'est  un cri  aigu  comme  celui  de  la  balle  sur  le  champ  de  bataille, et  au  même  instant  passe  droite  et  rapide  une  masse  qui donne  dans  le  filet.

C'est  une  grive  gourmande  qui  allait  picorer  et  qui, folle,  imprudente,  quoique  nerveuse  et  sauvage,  se  confiant dans  la  rapidité  de  son  vol,  est  venue  piquer  la  tête au  beau  milieu  du  danger.

Le  filet  tombe,  le  chasseur  se  précipite,  la  ramasse, L’étouffe  et  relève  son  filet.

Quatre,  cinq,  six  grives  la  suivent  à  peu  de  distance.

Quelquefois, une  d'elles  franchit  le  pas  avant  que  le  perfide engin  ne  soit  relevé ;  quelquefois,  une  autre  passe  à  deux doigts  plus  haut  que  la  cordelle,  et  voilà  que  les  étoiles  sont complètement  effacées,  qu'une  ligne  grisâtre  paraît  au dessus  des  montagnes,  et  que  la  bise  qui  fraîchit  annonce que  bientôt  l'aurore  va  se  lever.

Alors,  parfois,  une  ombre  passe  dans  la  forêt.  L'apparition est  rapide;  ni  cri,  ni  coup  d'aile  ne  l'ont  fait  pressentir.

C'est  un  boulet  de  canon  qui  passe  sans  sifflement  et  qui s'est  jeté  à  votre  insu  dans  vos  mailles.

Ouvrez  l'œil,  lâchez  la  corde,  ayez  la  main  légère  et prompte,  car  c'est  une  bécasse,  un  morceau  de  roi  qui  est venu  se  faire  capturer.

On  commence  à  distinguer  les  objets  dans  la  forêt;  les oiseaux  ont  fini  leur  passage,  on  peut  détendre  les  cordes et  faire  joyeusement  son  paquet.

Alors,  la  forêt  silencieuse  qui  semblait  vide  est  tout  à coup  pleine,  animée  et  bruyante  ;  tout  le  monde  s'appelle, se  reconnaît,  s'interroge,  s'interpelle  ;  un  voisin  en  causant a  fait  manquer  un  coup  superbe;  une  fourchette  a cassé,  une  corde  n'a  pas  glissé,  une  bécasse  a  passé  trop haut;  l'un  a  son  carnier  plein,  l'autre  n'a  pas  eu  de  chance; on  se  cherche,  on  se  groupe,  on  discute  en  descendant,  on se  donne  rendez-vous  pour  le  chien  d'arrêt  ou  les  chiens

courants,  et  on  va  rejoindre,  à  Ambérieu,  à  Jujurieux  ou  à Poncin,  le  déjeuner  qui  vous  attend.

 

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Ici  se  pose  une  question.

Est-il  vrai  que  la  grive  soit  un  oiseau  ivrogne  et  qu'elle boive,  s'abrutisse  et  tombe  dans  tous  les  excès,  dans toutes  les  dégradations  des  buveurs  de  profession ?

Les  anciens  l'ont  regardée  comme  un  oiseau  de  mauvaise vie.  On  l’avait  consacrée  à  Bacchus,  et  un  proverbe calomnieux  comme  beaucoup  de  proverbes,  dit  insolemment : saoul  comme  une  grive.

D'abord,  parce  que  le  vin  fermenté  peut  enivrer,  est-ce une  raison  pour  qu'une  graine  de  raisin,  cueillie  et  picorée  sur  le  cep,  puisse  troubler  la  raison  et  monter  à  la  tête ?

J'aurai  de  la  peine  à  en  convenir.

Soyons  justes,  même  avec  les  pauvres  grives  qui  elles auraient  bien  d'autres  choses  à  nous  reprocher.

c'est  la  calomnie  impure qui  a  souillé  la  grive  et  non  la  médisance,  sa  non  moins dangereuse  sœur.

Rendons-lui  donc  justice  à  cet  oiseau  charmant;  ne  lui prêtons  pas  un  de  ces  vices  honteux  qui  dégradent l'humanité  ;  c'est  bien  assez  de  l'ivresse  de  l’homme  dans  le monde  sans  y  ajouter  celle  de  cette  aimable  créature.

A  la  pantière  ou  au  fusil,  la  chasse  à  la  grive  est  charmante,  qui  pelote  ce  gibier  dans  une  vigne  à  échalas  est un  fin  tireur,  un  maître.

La  grive  est  élégante  de  forme,  jolie  de  couleurs,  vive  et enjouée  de  caractère,  délicieuse  au  goût.  Allons,  de  grâce, confrères  en  saint  Hubert,  mangeons-la,  mais  ne  la  calomnions pas.

 

Aimé  VlNGTRINIER.

 

(1)   Faux-bourdon: abeille mâle

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Source: Archives de l'Ain; "Fantaisies lyonnaises : Chasse à la grive, avec une introduction de Joséphin Soulary ; Pêche à l'alose ; la Statistique à Lyon ; la Damnation de Gounod, etc.

 

 

 

 


07/07/2023
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Chasse et Tradition.

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Le sous-titre de ce petit livre est beaucoup plus explicite:

"Comment faire chanter au mieux nos oiseaux de chasse".

Il s'agit en fait d'un manuel destiné aux chasseurs de grives au poste à feu désirant faire ramager les appelants par la méthode dite du programmateur de lumière.

Remarques:

- Le titre est mal choisi, le programmateur de lumière (fotoperiodo en italien) n'est pas une technique "traditionnelle".

- La traduction de l'italien en français est de piètre qualité.

Quoiqu'il en soit, ce livre a le mérite d'exister.

L'auteur est: Vanni Ligasacchi

Editeur: Beretti (révisé et mis à jour en juillet 2019)

Format: 13 x 19

Nombre de pages: 120

Prix actuel: 25 €

On peut se le procurer ici: https://grives.net/product/chasse-et-tradition

Grives.net est distributeur exclusif de ce livre pour la France.

 

Ci-dessous la 4e de couverture, on ne s'attardera pas sur la qualité de la traduction:

 

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24/11/2019
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La tenderie aux grives chez les Ardennais du plateau.

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La tenderie aux grives est un mode de capture traditionnel des turdidés, pratiqué exclusivement dans les massifs forestiers du plateau de l'Ardenne (au nord du département), sur un territoire de 1000 km2 environ.

Mode de piégeage très ancien, la tenderie a fait l'objet de nombreuses attaques de la part des écologistes.

Aujourd'hui, très réglementée, elle ne concerne plus que 250 pratiquants environ.

Outre son aspect de "passe-temps" et gastronomique, la tenderie revêt, aujourd'hui, une dimension identitaire très marquée.

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Le livre: il s'agit d'un ouvrage ethnologique qui peut paraître ardu de prime abord mais qui s'avère passionnant à la lecture.

Parution: 1/1/1979, auteur: Jean Jamin, éditeur: Institut d'Ethnologie du Musée de l'Homme.

 

Ce livre peut être téléchargé gratuitement:

  http://classiques.uqac.ca/contemporains/jamin_jean/tenderie_aux_grives/tenderie_aux_grives.pdf


26/06/2019
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Les Ecrivains et la Chasse des grives: Emile Zola, SOUVENIRS.

Emile Zola est né à Paris en 1840, 3 ans plus tard, ses parents s'installent à Aix qu'il devra quitter en 1858.

Il passe donc toute sa jeunesse en Provence.

De cette jeunesse provençale, il a laissé un témoignage de chasse savoureux dans ses "Nouveaux contes à Ninon", oeuvre  publiée en 1874.

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Émile Zola

Souvenirs
Nouveaux contes à Ninon

Chapitre IV

  

... Je ne connais qu’une chasse, une chasse dont les Parisiens ignorent les charmes tranquilles. Ici, dans les champs, il y a des lièvres et des perdrix; on ne tire pas sa poudre aux moineaux, on dédaigne les alouettes, réservant son coup de feu aux seules grosses pièces. En Provence, lièvres et perdrix sont rares ; les chasseurs s’attardent aux fauvettes, à tous les petits oiseaux des buissons. Quand ils ont tué leur douzaine de becfigues, ils rentrent très fiers au logis.

J’ai souvent couru les terres labourées, pendant des journées entières, pour rapporter trois ou quatre culs-blancs*. J’enfonçais jusqu’aux chevilles dans le sol mouvant comme un sable fin. Le soir, quand je ne pouvais plus me tenir sur les jambes, je rentrais, ravi.

Si, par miracle, un lièvre passait entre mes jambes, je le regardais courir avec un saint étonnement, tant j’étais peu habitué à rencontrer de si grosses bêtes. Je me souviens qu’un matin un vol de perdrix se leva devant moi ; je restai si abasourdi par ce grand bruit d’ailes, que je lâchai au hasard un coup de feu qui alla cribler un poteau télégraphique.

D’ailleurs, je confesse avoir toujours été un tireur détestable. Si j’ai tué pas mal de pierrots* dans ma vie, je n’ai jamais pu abattre une hirondelle.

 

 

C’est sans doute pour cela que je préférais la chasse au poste.

Imaginez une sorte de petite construction ronde, enfoncée dans la terre, s’élevant à peine d’un mètre au-dessus du sol. Cette cabane, faite de pierres sèches, est recouverte de tuiles qu’on dissimule le plus possible sous des bouts de lierre. On dirait un débris de tourelle rasée près des fondations et perdue dans l’herbe.

À l’intérieur, l’étroite pièce prend jour par des meurtrières, que ferment des vitres mobiles. Le plus souvent, le réduit a une cheminée et des armoires ; j’ai même connu un poste qui avait un divan. Autour du poste sont plantés des arbres morts, des cimeaux, comme on les nomme, au pied desquels on accroche les appeaux, les oiseaux prisonniers chargés d’appeler les oiseaux libres.

La tactique est simple. Le chasseur, tranquillement enfermé, attend en fumant sa pipe. Il surveille les cimeaux par les meurtrières. Puis, quand un oiseau se pose sur quelque branche sèche, il prend son fusil méthodiquement, en appuie le canon sur le bord d’une meurtrière et foudroie la malheureuse bête presque à bout portant.

Les Provençaux ne chassent pas autrement aux oiseaux de passage, aux ortolans en août, aux grives en novembre.

 

 

Je partais à trois heures du matin, par de glaciales matinées de novembre. J’avais une lieue à faire dans la nuit, chargé comme un mulet ; car il faut porter les appeaux, et je vous assure qu’une trentaine de cages ne se transportent pas facilement, dans un pays de collines, par des sentiers à peine frayés. On pose les cages sur de longs cadres de bois, où des ficelles les tiennent et les serrent les unes contre les autres.

Quand j’arrivais, il faisait noir encore, le plateau s’étendait, profond, farouche, pareil à une mer d’ombre, avec ses broussailles grises, à l’infini. J’entendais tout autour de moi, dans les ténèbres, ce remous des pins, cette grande voix confuse qui ressemble aux lamentations des vagues. J’avais alors quinze ans, et je n’étais pas toujours très rassuré. C’était déjà une émotion, un plaisir âcre.

Mais il fallait se dépêcher. Les grives sont matinales. J’accrochais mes cages, je m’enfermais dans le poste. Il était trop tôt encore, je ne distinguais pas les branches des cimeaux. Et pourtant j’entendais sur ma tête le sifflement rude des grives. Ces gueuses-là voyagent la nuit. J’allumais du feu en grondant, je me hâtais d’obtenir un grand brasier, qui luisait rose sur la cendre. Dès que la chasse a commencé, il ne faut plus que le moindre filet de fumée sorte du poste. Cela pourrait effaroucher le gibier. J’attendais le jour, en faisant griller des côtelettes sur la braise.

Et j’allais de meurtrière en meurtrière, épiant la première lueur pâle. Rien encore ; les cimeaux dressaient leurs bras désolés, vaguement. J’avais déjà de mauvais yeux, je craignais de lâcher un coup de fusil sur un bout de branche noirci, comme cela m’arrivait quelquefois. Je ne me fiais pas seulement à ma vue, j’écoutais. Dans le silence, frissonnaient mille bruits, ces chuchotements, ces soupirs profonds de la terre à son réveil. La clameur des pins grandissait, et il me semblait par moments qu’un vol innombrable de grives allait s’abattre sur le poste, en sifflant furieusement.

 

 

Mais les nuées devenaient laiteuses. Sur le ciel clair, les cimeaux se détachaient en noir, avec une singulière netteté. Alors, toutes mes facultés se tendaient, je restais plié d’anxiété.

Quel coup dans l’estomac, lorsque, brusquement, j’apercevais la longue silhouette d’une grive sur un cimeau ! La grive s’allonge, fait la belle au premier rayon, reste droite, les yeux au soleil, dans le bain matinal de lumière. Je prenais mon fusil avec des précautions infinies, pour ne point heurter le canon ou la crosse. Je tirais, l’oiseau tombait. Je n’allais pas le ramasser, cela aurait pu éloigner d’autres victimes.

Et je reprenais mon attente, secoué par cette émotion du joueur qui a eu un coup heureux, et qui ne sait ce que lui garde la chance. Tout le plaisir d’une pareille chasse consiste dans l’imprévu, dans la bonne volonté que le gibier met à venir se faire tuer. Une autre grive se posera-t-elle sur un des cimeaux ? Question troublante. Je n’étais pas difficile, d’ailleurs : quand les grives ne venaient pas, je tuais des pinsons.

 

 

Je revois aujourd’hui le petit poste, au bord du grand plateau désert. Il vient des collines une senteur fraîche de thym et de lavande. Les appeaux sifflent doucement dans le grand remous des pins. Le soleil montre à l’horizon une mèche de ses cheveux flambants, et il y a là, sur un cimeau, dans la clarté blanche, une grive immobile.

Allez courir les lièvres, et ne riez pas, car vous feriez envoler ma grive

 

□ □ 

 

* culs-blancs, pierrots: traquets motteux

 

 


14/05/2018
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