Aviceptologie françoise ....
Le titre exact de cet ouvrage du XVIIe siècle est:
"AVICEPTOLOGIE FRANCAISE ou TRAITE GENERAL de toutes les Ruses dont on peut se servir pour prendre les Oiseaux; avec une Collection considérable de Figures et de Pièges propres à différentes Chasses"
L'auteur, Jean-Baptiste François Bulliard, dit Pierre Bulliard (1752-1793) est un naturaliste Français auteur de nombreux ouvrages de botanique et d'un traité d'aviceptologie dont j'ai, sous les yeux, la 7e édition de 1818.
En préambule de son ouvrage, Bulliard écrit: "Le goût que j'eus, dès l'enfance, pour les différentes chasses aux oiseaux et les progrès rapides que je fis dans cet Art, me valurent bientôt le titre d'habile Oiseleur"
Le livre est intéressant et on lira avec un intérêt particulier les chapitres consacrés aux grives et à leurs modes de chasse et de capture.
Chasse aux Grives
Il y a de l'agrément à faire cette chasse, au temps des vendanges. Les grives, enivrées par le raisin, se laissent approcher plus facilement dans les vignes et sur leurs bords; vers la Toussaint, elles viennent en foule aux alisiers, dont le fruit leur plait beaucoup; et en se mettant à l'affût sous un de ces arbres, on est assuré d'y faire bonne capture.
La véritable saison pour tirer les grives, est depuis la fin de septembre, temps où les raisins sont en maturité, jusqu'aux premières gelées, que ces oiseaux commencent à disparaître; mais pour en tuer beaucoup, il faut les tirer au vol, ce qui n'appartient pas au commun des chasseurs. Deux chasseurs qui s'entendent pour battre une haie, en la longeant chacun de son coté, sont assurés de tuer des grives et des merles, en les tirant au vol, à mesure qu'ils partent.
Autre manière de prendre les Grives.
Placez sur une touffe de gui qui croît ordinairement sur les chênes ou les vieux pommiers, un cercle fait de houssines (baguettes de houx) vertes liées ensemble et garnies de collets de crin de cheval; les grives, tourets et trayes (draines), étant très friands du fruit de cette excroissance, gros comme des pois, se prendront aux collets qui seront placés les uns plus haut que les autres.
Houssines avec collets
Le Mauvis
C'est la petite grive de gui; elle s'engraisse extraordinairement dans les vignobles, et c'est dans cette saison que sa chair est la plus estimée. Les anciens donnaient à cette grive le premier rang parmi les oiseaux recherchés pour la table.
Chasse des Grives à l'Arbret* et au Poste
Cette chasse se pratique surtout aux environs de Marseille. On choisit dans une vigne un petit tertre ou monticule, qu'on se procure artificiellement, s'il ne s'en rencontre pas un sur le lieu. On y plante un petit bouquet de jeunes pins, et au milieu, un arbre de quinze à vingt pieds** de haut. L'amandier est celui qui convient le mieux par la raison que sa feuille est fort petite et cache moins les oiseaux. Au défaut d'un arbre vert, on peut se servir d'un arbre sec, qu'on plante sur la terre. Les grives et les autres oiseaux s'y perchent également. On place à terre, entre ces arbres ou arbustes, des cages pour servir d'appeaux, cinq ou six grives prises aux gluaux, et conservées dans des volières, qu'on nourrit de figues hachées avec du son et du raisin noir. Ces cages sont suspendues à des piquets, à deux ou trois pieds de terre. A quelque distance de l'arbre, on construit une cabane fort basse, en creusant la terre de deux ou trois pieds**, de manière qu'elle n'excède le niveau du terrain que d'à peu près autant; on la recouvre en dehors de ramées et de lierre qui est toujours vert, afin qu'elle effarouche moins les oiseaux, et que sa verdure se maintienne plusieurs jours. Le chasseur se tient tapi dans sa cabane; et au chant des oiseaux, il arrive de temps en temps des grives, qui viennent se poser sur l'arbre, et qu'il tire à mesure qu'elles se présentent, par de petites ouvertures ménagées à la cabane. La saison de cette chasse est depuis les derniers jours de septembre jusqu'à la fin d'octobre. On la commence dès la pointe du jour jusqu'à sept heures qui est le fort du passage: elle se fait cependant jusqu'à neuf ou dix heures. On peut y tuer trois ou quatre douzaines de grives.
* Chasse à l'arbret: Arbuste fiché en terre et garni de gluaux pour capturer les oiseaux
** 1 pied = 32 cm environ
Arbret
Du Merle
Cet oiseau est de la grandeur de la grive et des étourneaux; sa ponte est de 4 à 5 œufs bleuâtres. Il se nourrit indistinctement de baies et d'insectes; aime à se baigner, s'éplucher et à voler seul; son sifflement est très agréable, surtout aux approches de la pluie ou lorsque le temps est sombre. Il est à remarquer que, quand il chante, il tient toujours son bec jaune en l'air: on peut facilement lui apprendre à parler, étant docile de sa nature. Quand on veut élever le merle pour le chant, il faut le prendre au nid, et lui donner, pour nourriture, du cœur de bœuf, de la viande, du pain trempé et du fruit.
Chasse du Merle à la Fossette
On fait une fossette de 7 à 8 pouces* en tous sens, sur 6 de profondeur, sur laquelle vous mettez une tuile tendue avec un quatre de chiffre**, dans le fond d'une baie; vous y placez des vers de terre piqués d'une longue épine, de façon que l'oiseau voulant prendre à manger, pose la patte sur le bâton, ce qui fait mouvoir le ressort, et tomber la tuile sur le gibier qui se trouve enfermé dans la fossette.
* Un pouce = 2,7 cm
** Quatre de chiffre:
Quatre de Chiffre
Chasse du Merle à la Repenelle
Cette chasse se fait vers la fin des vendanges. On choisit, dans un taillis, un arbuste droit et élevé; on l'émonde jusqu'à environ 5 pieds de hauteur; on le perce avec une vrille à environ 4 pieds et demi. On prend un autre arbuste, éloigné du premier de 4 pieds; on en ôte toute la ramille, et on attache à l'extrémité supérieure une petite ficelle longue de 6 pouces, à laquelle on noue un collet de crin, fait en nœud. On prend alors l'extrémité supérieure de ce dernier arbuste, on le courbe de façon qu'il avance presque jusqu'à l'autre, et on passe le collet dans l'ouverture qu'on a faite dans le premier arbuste, en tirant jusqu'au nœud de la ficelle qui vient au niveau du trou.
Il faut avoir un petit bâton long de 4 doigts*, fait d'un coté en forme de petit crochet, et arrondi par l'autre, qui se terminera un peu en pointe: on l'insère un peu dans le petit espace qui doit rester depuis le nœud jusqu'au bord de l'ouverture de l'arbuste, et on l'y place fort à l'aise. On l'étend ensuite dessus le collet qu'on ouvre en rond, et qu'on pose à plat sur la marchette du petit bâton. Si vous mettez au-dessus du piège une grappe de raisin, l'oiseau qui viendra la becqueter, se placera sur la marchette du bâton; elle tombera, l'arbuste plié reprendra sa première direction, et le merle se trouvera saisi par le lacet.
* Un doigt = 20,3 cm.
Grive Draine
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