Des grives aux merles

Des grives aux merles

La Chasse des Canards: Une expédition en Camargue. 3/3

 

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Episode 3/3, suite et fin 

 

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     Le tir de l'extême droite sera difficile, enfin, on verra bien !

     La pose des appelants fut facile; il y avait à peine trente centimètres d'eau et le fond était dur.

     Je déposai la paille dans mon hutteau et je l'étendis dans le fond pour qu'elle me serve de matelas. Je rentrai tous mes accessoires; j'enlevai mes bottes ne voulant pas mouiller ni salir une si belle couche et je me glissai dans l'étroit espace. J'y étais fort bien et, pour tirer assis, la hauteur était bonne; toutefois le manque de longueur m'obligeait à laisser mon canon de fusil engagé dans le guichet. J'arrangeai tout mon petit matériel, les cartouches en premier, à la portée de ma main.

     Ayant fermé le couvercle de ma petite hutte je contemplai avec joie le magnifique coucher de soleil, cet horizon embrasé, sur un fond de ciel si bleu...

     Mes compagnons de chasse étaient tranquilles et n'avaient nullement l'air dépaysés. Ils barbotaient comme à l'habitude, mais ne buvaient guère, l'eau étant assez saumâtre dans ces baisses.

     l'heure de la passée n'était pas éloignée et j'entendais au loin le chant plaintif de quelques échassiers.

     Je levai le couvercle de ma hutte... Rien ne bougeait aux alentours sur le grand étang de Noilly-Prat. Seul le cri strident des judelles rompait la monotonie. Je regardai mes appeaux.

     Brusquement, les mâles avaient dressé leur cou; je plongeai au fond de la hutte, deux ou trois canes chantaient au renard et je vis un petit plongeur donner quelques coups de bec à la cane de devant.

     Je me montrai, cet indésirable s'éloigna en plongeant et disparut...

     J'étais étonné de ne rien voir encore; les vents étaient toujours Nord, ils étaient assez forts et le gibier semblait avoir disparu. La nuit vint, je songeai que la lune ne se lèverait que vers neuf heures, que malgré la belle nuit étoilée on n'y verrait guère à plus de douze mètres.

     J'entendis au loin quelques coups doubles. C'étaient des chasseurs qui faisaient la passée en bordure de mer... Je refermai ma trappe et m'installai confortablement, mon fusil appuyé sur une cuisse et le canon sur mon tir...

     La cane du Nord chante, les mâles dressent leurs cous, j'ai deux canards posés à quinze mètres. Ce sont des morillons, ils se croisent et restent foudroyés. Il ne fait pas nuit encore et je n'ose sortir car la cane chanteuse a repris immédiatement son chant... Mes canes doublent, l'eau jaillit devant moi, tout près, j'ai cinq sarcelles posées à trois mètres.
     J'hésite un instant, mais j'en ai deux au coup et je tire haut. Elles sont foudroyées et ont leur tête bien abîmée. J'ai doublé les autres au vol sans succès.

     Je ne veux pas laisser ces deux dernières victimes juste devant la hutte d'autant plus qu'elles ont le ventre en l'air ce qui n'est pas précisément une pose naturelle chez un canard ! Je me décide et enfile en vitesse mes bottes. six gros canards passent au ras de la hutte; je suis sans fusil ! Je ramasse mes quatre victimes et ma foi, tant pis, je rentre dans ma boite avec mes bottes.

     J'entends les sauvages qui passent sans arrêt et mes canards sont déchaînés. sept à huit ombres sur le clair, l'eau blanchit au loin et je vois quelques points noirs; je cherche à choisir ceux qui se rapprochent, mais je n'ai guère le temps et trois gros canards, la tête haute et en paquet viennent se poser à coté des mâles. Je n'hésite pas et je mets fin à ce court dilemme. Deux canards sont restés. Les canards passent et se posent sans arrêt. Je tire et recharge, ne bougeant pas de ma hutte. J'ai tiré ainsi une dizaine de fois, et, n'ayant aucun intérêt à attendre, je l'ai fait presque toujours sur des canards isolés.

     Le lendemain, je revins et retrouvai une semblable réussite. Bref, mon séjour s'écoula dans les enchantements toujours renouvelés des nuits camarguaises et, même à présent, je n'évoque jamais sans émotion mon voyage aux Saintes-Maries-de-la-Mer, pèlerinage païen où les "divinités", venues de la mer, fonçaient sur mon hutteau enfoui dans les enganes.

 

                                                                                                RENE DUPEYRON

 

 

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17/08/2025
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